L’industrie de la santé au Vietnam : les avantages offerts par l’EVFTA

En 2024, la santé publique reste un enjeu primordial au Vietnam, renforcé par les leçons tirées de la pandémie de COVID-19. La demande locale pour des produits pharmaceutiques de qualité, des dispositifs médicaux innovants et des services hospitaliers performants ne cesse de croître dans un pays en pleine transition démographique et économique.

Depuis son entrée en vigueur le 1er août 2020, l’Accord de libre-échange UE-Vietnam (EVFTA) a favorisé une réduction progressive des droits de douane sur les produits pharmaceutiques et les dispositifs médicaux européens. Cette diminution tarifaire soutient les exportations de l’Union européenne tout en facilitant l’accès des Vietnamiens à des traitements innovants répondant à des standards élevés de qualité et de sécurité.

La production pharmaceutique vietnamienne reste principalement orientée vers des produits de base, alors que l’Union européenne excelle dans la production de dispositifs médicaux avancés et de médicaments innovants.  Grâce à l'EVFTA, cette complémentarité économique se voit être renforcée, permettant ainsi de mieux répondre à la demande domestique croissante pour des produits de santé de pointe.

Ces dynamiques soutiennent non seulement la modernisation du système de santé vietnamien, mais contribuent également à la reconnaissance des normes européennes sur un marché asiatique en expansion rapide.

Panorama de l’industrie pharmaceutique au Vietnam

« Le Vietnam devrait continuer à figurer parmi les 20 pays ayant la croissance dans le secteur pharmaceutique la plus forte et la plus stable du monde ».

Telle est la conclusion de nombreuses études menées par de grandes sociétés de recherche comme BMI et Euromonitor International.

En effet, depuis plusieurs années, le marché pharmaceutique vietnamien connaît une croissance rapide, et a un taux de croissance annuel de 7,96 % prévu entre 2023 et 2029.

La valeur totale du marché pharmaceutique vietnamien est déjà passée de 2,7 milliards d'USD en 2015 à 7 milliards d'USD en 2022 et devrait atteindre plus de 10 milliards d'USD d'ici 2026.

Les entreprises vietnamiennes se concentrent principalement sur la production de médicaments génériques. Cependant, l'approvisionnement des autres types de médicaments dépend largement des importations, qui représentaient plus de 60% du total en 2023. Fortement dépendant des importations, la France est historiquement l’un des principaux fournisseurs du Vietnam, en effet, 14% des importations totales proviennent de France.

Si le potentiel du secteur de la santé est une certitude, la capacité du Vietnam à investir et à innover dans ce domaine l’est moins. A ce niveau, le jeune dragon asiatique a besoin de la connaissance et des compétences de ses partenaires européens. Sur le plan de la coopération notons qu’entre 2012 et 2017, l’UE a accordé 1 milliard d’euros au secteur de la santé au Vietnam « pour l’aider à  améliorer ses compétences, notamment dans la prestation des soins de santé préventifs ».

Le développement de cette coopération est désormais facilité par l’EVFTA qui vient renforcer l’attractivité du Vietnam dans ce secteur.

Un accès au marché vietnamien facilité pour les entreprises européennes

Une réduction progressive des droits de douane

Face au vieillissement des équipements médicaux dans les hôpitaux publics, le Vietnam a adopté, dans le cadre de l'EVFTA, des droits de douane réduits et l'absence de quotas pour ces équipements. Une approche similaire s'applique également aux produits pharmaceutiques.

Le Vietnam a éliminé 65 % des droits de douane sur les exportations européennes dès l’entrée en vigueur de l’EVFTA, tandis que les droits restants seront progressivement supprimés sur une période de 10 ans. Pour les exportations vietnamiennes vers l’Union européenne, 71 % des droits ont été immédiatement supprimés lors de la mise en œuvre de l’accord, avec une élimination progressive des droits restants sur une période maximale de 7 ans

Cette évolution des droits de douane a contribué à une augmentation de 24,2 % des importations pharmaceutiques au Vietnam au cours des neuf premiers mois de 2024, par rapport à la même période en 2023. Parmi ces importations, les pays de l'Union européenne, comme la France, représentent 13,3 % du total dans ce secteur.

Ce changement est essentiel et contribuera à l’accroissement des exportations européennes vers le Vietnam. 

Grâce à son expertise reconnue en matière de médicaments et d’équipements médicaux, la France occupe la première place parmi les fournisseurs de médicaments du Vietnam. La réduction progressive des droits de douane prévue par l’EVFTA permettra à la France de consolider cette position dominante tout en augmentant sa part de marché dans ce secteur stratégique.

 

Un accès aux marchés publics vietnamiens

À l’issue d’une période transitoire de deux ans après la ratification de l’EVFTA, les entreprises européennes ont désormais accès aux marchés publics vietnamiens. Cet accès inclut les appels d’offres pour des secteurs stratégiques tels que la santé, les infrastructures et les technologies de l’information, tout en respectant les engagements de transparence et de non-discrimination définis par l’accord.

L'EVFTA ouvre ainsi des opportunités significatives aux entreprises de l'UE pour participer à des projets financés par l’État vietnamien, en mettant fin à des barrières auparavant réservées aux fournisseurs locaux. Ce processus renforce les échanges économiques bilatéraux tout en favorisant la modernisation des infrastructures et des services au Vietnam.

Cet accès est conditionné par des seuils dont les valeurs seront abaissées progressivement d’ici une dizaine d’années. Cela permettra de réduire la part des marchés publics réservés aux entreprises locales à 50 %. 

Grâce à cette ouverture, le Ministère de la Santé ainsi que les 34 hôpitaux publics pourront centraliser leurs achats de produits pharmaceutiques. Cette ouverture crée un gain de temps et d’argent pour ces entités et ouvre une nouvelle fenêtre d'opportunités pour les entreprises européennes. 

 

Une possibilité d’établir une « entreprise à investissements étrangers »

Avant l’entrée en vigueur de l’EVFTA, la législation vietnamienne interdisait aux sociétés étrangères de distribuer directement des médicaments sur son territoire. Les entreprises européennes devaient alors obligatoirement passer par des partenaires locaux pour accéder au marché, souvent via des collaborations stratégiques ou des opérations de fusion-acquisition.

Depuis la ratification de l’EVFTA, le Vietnam a pris des engagements majeurs en ouvrant son marché pharmaceutique aux entreprises étrangères, notamment européennes. Ces sociétés peuvent désormais établir une entité pharmaceutique sur le territoire vietnamien. Cela leur permet d’importer leurs produits pharmaceutiques, de les stocker dans leurs propres entrepôts, et de les revendre directement aux distributeurs et grossistes locaux. Cette réforme favorise un accès plus transparent et équitable au marché vietnamien, tout en renforçant les opportunités commerciales pour les entreprises européennes.

Une protection des savoir-faire médicaux européens assurée par l’EVFTA

Une protection des données des produits pharmaceutiques

Le Vietnam a entendu protéger, pour une durée de 5 ans, les données des produits pharmaceutiques résultant d’essais. 

Toutefois, lorsque la divulgation de ces données résulte d’une condition préalable à l’obtention d’une autorisation de mise sur le marché, le Vietnam s’est engagé à protéger les données contre l’exploitation déloyale de celles-ci dans le commerce.

 

Une protection des droits de la propriété intellectuelle 

La mise sur le marché de produits pharmaceutiques protégés par un brevet est soumise à une procédure d’autorisation administrative qui peut, parfois, s’avérer longue. 

Avec l’EVFTA, la durée de validité du brevet et des droits associés sont désormais prolongés lorsque des retards excessifs liés à la procédure administrative ont pour effet de raccourcir la période d’effectivité du brevet. La durée maximale de cette prolongation ne dépasse pas deux ans. Autrement dit, les aléas administratifs sont compensés et le Vietnam est devenu un marché plus sûr pour les entreprises européennes de l’industrie pharmaceutique. 

Pour résumer, et à l’heure où la demande de soins de santé augmente rapidement dans la région, l’EVFTA rend l’industrie pharmaceutique vietnamienne attractive. Cet attrait permet le développement de l’investissement européen mais il permet surtout à la population vietnamienne de bénéficier de produits pharmaceutiques européens de bonne qualité et à bas prix. 

La gestion exemplaire de la pandémie de la COVID-19 par le gouvernement vietnamien ainsi que les défis posés par le vieillissement de la population et l’accès aux soins dans les zones isolées font du Vietnam une terre d’opportunités pour le développement de ce secteur.

Toutefois, un risque de dépendance à l’égard de l’Union demeure présent. Faciliter l’exportation de l’innovation et du savoir-faire européen au Vietnam à moindre coût permettra-t-elle à l’industrie pharmaceutique vietnamienne de développer sa propre compétence ou, au contraire, laissera-t-elle le secteur vietnamien dans l’ombre de la compétence européenne ?

© Article rédigé par la Chambre de Commerce et d’Industrie France-Vietnam (CCIFV). Droits de reproduction réservés.

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